Revenons sur quelques chiffres, connus de beaucoup. Le cancer c’est 350 000 nouveaux cas par an; c’est aussi 625 000 patients en cours de traitement chaque année. Plus intéressante est l’évolution historique : 2 fois plus de cas annuels qu’en 1980 en France.

Intéressant est aussi d’observer les projections faites par l’OMS. Si la croissance du cancer ralentira dans les pays les plus développés (le nombre de cas passant de 5 à 8 millions), elle est nettement plus accentuée dans les pays moins développés (le nombre de cas passant de 8 à 15 millions). Des analyses ne peuvent s’empêcher de faire le parallèle entre cette évolution et l’industrialisation massive récente de certaines régions en développement. L’OMS, quant à elle, avance des explications prouvées scientifiquement et qui relèvent du mode de vie et de certains déterminants environnementaux.

Comprendre les déterminants du cancer

Mais une chose est certaine : cette maladie a connu une croissance dramatique très récente et des paramètres doivent venir expliquer ça. Maintenant y a plus qu’à isoler les milliers de paramètres (biologiques, environnementaux, géographiques, comportementaux, culturels…) et analyser les millions de possibilités d’associations en eux…

Des milliers de publications plus loin, aurons-nous fait le tour de la question ? Car il faudrait en fait une masse de données et une capacité de traitement exceptionnelles pour tenter de déminer ça. Google quoi.

Google et le big data santé

Et oui. Google connait les comportements, les cultures, la génétique… et sait intégrer d’autres sources de données s’il le faut. Quand Deepmind (filiale d’Alphabet/ Google) étudie des cohortes de 1,6 millions de patients britanniques pour anticiper les maladies avant les symptômes, Verily (autre filiale) associe software, clinique et science fondamentale dans le sens de la médecine prédictive. Oui, la science passe par le processus critique, par le besoin de consensus quand Google met en place des cohortes massives pour des analyses de données jamais menées. Plus simplement, j’observe juste certains discutent encore la règle des 10 000 pas par jour quand Google est sur le point d’anticiper les maladies avant les symptômes. Cueillette à la main contre moissonneuse hichtech.

Il est intéressant de noter que Google ne s’attaque pas (à notre connaissance) à la compréhension des interactions santé-environnement. Plusieurs raisons à ça, selon nous. L’environnement ne dépend pas de l’individu mais de systèmes complexes de décisions. Il est donc plus difficile d’agir sur lui, alors que la décision de santé, notamment dans la médecine comportementale, se place au niveau de l’individu. Et Google croit absolument en l’individu. Autre raison probable : modifier l’environnement ce n’est pas un business accessible pour Google (changer d’énergie, dépolluer…). Trop d’incertitudes donc sur les débouchés de la recherche sur l’environnement. Google ira donc aussi loin que la prévention en santé puisse aller mais pas jusqu’à modifier les déterminants environnementaux.

Une nouvelle médecine pour Google seul ?

S’il parvient à repousser les limites de la prévention en santé, Google modifiera définitivement les modes d’action sur la santé humaine. Appliquée d’abord aux grandes pathologies chroniques, leurs technologies et leurs moteurs de calcul seraient réplicables à d’autres maladies majeures.

Beaucoup d’espoir donc. Et beaucoup d’inquiétude aussi, forcément, à laisser un tel pouvoir entre les mains d‘un seul. Les résultats ne sont pas encore là donc pas de conclusion hâtive. D’autres laboratoires de recherche et consortiums s’engagent sur la même voie, celle du vrai big (huge) data santé. Les études massives de données de santé seront-elles alors monnaie courante quand les capacités de calcul seront démocratisées et l’opendata la norme ? Ces consortiums sauront-ils mieux interpréter les données cliniques ? Le big data santé sera-t-il alors uniquement entre les mains de Google ?